Le concept du Thin Blue Line, ou de Mince ligne bleue, a été popularisé aux États-Unis. Son association à la police est récente, remontant aux années 50 à Los Angeles. Porté sous forme d’écusson par les forces policières, il s’agit d’une simple bande bleue sur le drapeau américain ou canadien en nuances de noir (voir ci-dessous). Il symbolise le corps policier séparant l’ordre du chaos. Dans le contexte de l’émergence du port de l’écusson, ledit « chaos » faisait référence aux Afro-américain·e·s qui revendiquaient pour la reconnaissance de leurs droits humains.
Le Thin blue line a été repopularisé à la suite du mouvement des droits civiques afro-américain Black Lives Matter (La vie des NoirEs compte), qui a résonné à travers tous les États-Unis et au Canada. Depuis, le Thin Blue Line est associée à Blue Lives Matter (La vie des policiers compte), qui vise à s’opposer à Black Lives Matter en s’en prenant à sa légitimité. Des groupes d’extrême-droite et de suprémacistes blancs se sont aussi approprié le Thin Blue Line dans leurs rassemblements, qu’ils portent avec le drapeau confédéré. Sous couvert d’une solidarité envers des collègues morts ou blessés en service, le symbole transmet plutôt une idéologie suprémaciste blanche susceptible de légitimer la haine envers les personnes racisées. Rappelons qu’aucun policier n’est mort en service au SPVQ depuis 1993.
Plusieurs corps policiers ont choisi d’interdire le port du Thin Blue Line. Rappelons-le, le Code de déontologie des policiers du Québec prévoit qu’ils ont le « devoir de neutralité politique dans l’exercice de leurs fonctions, […] le devoir d’impartialité dans l’exercice de leurs fonctions […]. » La loi indique donc d’emblée que le port de ce genre de symbole est proscrit. La GRC, le SPVM, la police provinciale de l’Ontario, le Service de police de Toronto et bien d’autres ont interdit le port du Thin blue line à leurs policiers. Le chef du SPVM, Fady Dagher, a même reconnu publiquement que la symbolique de l’écusson a été contaminée par l’extrême-droite. En réponse, un nouvel écusson a été créé pour symboliser le souvenir des policiers morts en service. Qu’est-ce qui empêche le SPVQ de faire de même? Comment Bruno Marchand, en tant qu’employeur de la police, peut-il se laver les mains d’un enjeu d’une telle ampleur? Le refus de la Ville et du service de police d’interdire le Thin Blue Line peut difficilement être interprété autrement que comme de la complaisance face au racisme. Ou pire encore, comme une manière détournée de l’encourager.
En somme, que les policiers adhèrent ou non à l’idéologie raciale projetée par l’écusson n’a pas d’importance. C’est un message de haine et d’intolérance qui est reçu par les personnes qui sont interpellées par la police. Il serait impensable de tolérer le symbole d’un parti politique sur un uniforme policier. Pourquoi alors accepter un emblème de la suprématie blanche et de l’extrême-droite ? La Ville de Québec devrait emboîter le pas aux autres services de police et envoyer un message clair au SPVQ que ces idéologies ne sont pas les bienvenues.
C’est pour cela que nous demandons à l’administration Marchand :
qu’elle bannisse la pratique du port du Thin Blue Line pour son corps policier ;
qu’elle reconnaisse le profilage racial pratiqué par le SPVQ ;
qu’elle mène une enquête statistique sur l’ethnicité des personnes interpellées et interceptées ;
qu’elle veille au respect des droits de l’ensemble de la population de la ville.
Coalition pour le Droit de Manifester
Signée par:
– Rosie Kasongo, Collectif 1629
– Yhungu Kang, Collectif de lutte et d’action contre le racisme
– Karine Verreault, Regroupement des organismes communautaires de la région 03
– Anne-Valérie Lemieux-Breton, Regroupement des groupes de femmes de la région de la Capitale-Nationale
– Naélie Bouchard-Sylvain, Regroupement d’éducation populaire en action communautaire des régions de Québec et de Chaudière-Appalaches
– Josyanne Proteau, Ligue des droits et libertés – Section de Québec
– Gabriela Santos, Comité des Femmes immigrantes de Québec
– Anne-Sophie Trottier, Comité populaire Saint-Jean-Baptiste
– Sophie Tremblay, Collectif TRAAQ
– Anaïs Gousse, Association des étudiant-es en science sociale
– Charlotte Veilleux, Divergenres
– Laurent Lévesque, Association pour la défense des droits sociaux Québec Métropolitain
-Guillaume Béliveau Côté, Comité des citoyens et des citoyennes du quartier Saint-Sauveur
– Charles-Olivier P. Carrier Comité logement d’aide de Québec Ouest
– Linh (elle) Nguyên-Biron, La Maison des femmes de Québec
– Fanny Cantin ROSE du Nord
– Josiane Mondou, Clé en main
– Ty Rousseau, Point de Repères
– Marie-Ève Fortier, Agora
– Josée Turbis, Centre femmes d’aujourd’hui
– Raphaël Laflamme, Centre des travailleurs et travailleuses immigrants – Ville de Québec
– Azélie Rocray, Table citoyenne Littoral Est
– Laurence Bolduc, Corporation Jeunesse l’Évasion l’Ormière
– Félix Marois, Bureau d’animation et information logement
– Serge Petitclerc, Collectif pour un Québec sans pauvreté
– Felixe Jouanneau, ADDICQ Québec